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08 Jan

la banquette arrière (atelier n°4)

Publié par Raphaële

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elle - Quand repartez-vous ?
lui - Si nous nous trouvions nez à nez par hasard demain à 13h place Condorcet, je serais bien capable de repartir à Pékin pour la journée.

elle - Oh mais demain, je suis très réservée. je suis réservée une bonne partie de la journée.
lui - Dans ce cas, vérifiez je vous prie, vérifiez votre agenda que je sache si je dois faire mes bagages.

elle - Toujours votre gros sac vert et votre petite mallette marron ?
lui - Je vois que vous avez le goût des couleurs.

elle - Pas tant les vôtres, ne vous méprenez pas.
lui - Dans ce cas, je changerais tous mes bagages, je colorierais des fleurs violettes et des coccinelles édentées, j'ajouterais une bonne grosse écharpe grise en laine pour faire le tour du gros sac et griffonnerais quelques mots à l'encre sympathique sur ma mallette que j'oublierais peut-être, une fois n'est pas coutume, sur la banquette arrière de votre voiture.

elle - Vous ne savez donc pas quoi faire pour vous faire remarquer ? Vous serez bien avancé de débarquer sur le sol Chinois avec tout votre attirail. Il vous faudra bien une mousson, un raz de marée, une inondation pour enfin perdre ce qui vous pèse ainsi.
lui - Mais sachez ma chère que je pars très léger d'autant qu'à chacun de mes périples et de mes escapades et de mes tours du monde et de mes voyages d'affaires, je perds dès le départ un petit quelque chose dans votre coffre.

elle -  Vous pourriez être davantage attentif à vos affaires.
lui - Je préfère être attentionné aux vôtres.

elle - Parce que vous croyez vraiment qu'oublier vos petites histoires dans ma carlingue et dans mon carrosse et dans ma petite auto et dans ma berline vous rend attentionné à moi ? Et bien monsieur, je dois vous dire qu'après tous ces mois et peut-être même ces années, je n'en peux plus de faire le ménage après votre passage. Voyez, moi aussi je peux redonder et tire la dondaine !
lui - Vous n'aimez donc ni les roses, ni les tulipes, ni les marguerites ?

elle - Il peut bien m'arriver d'en faire de la confiture mais je ne déjeune plus depuis que je suis enceinte.
lui - Comment ça, vous êtes enceinte et ne me le dites pas ?

elle - Je vous le dis.
lui - Mais si cet enfant n'est pas le mien, de qui peut-il bien être ? Y a-t-il un homme, un homme dont vous n'ayez pas bouffé les fleurs ?

elle - Ne me parlez pas sur ce ton, l'affaire est suffisamment compliquée et d'ailleurs, que faites-vous ici vous-même ? Répondez-moi je vous prie. Voulez-vous bien remarquer que nous sommes tous les deux dans la salle d'attente d'un gynécologue obstétricien ?
lui - C'est qu'enfin, il m'a pris de tuer le hasard et je vous ai suivi depuis la station de taxi. De Pékin, je crois bien avoir senti l'orage et j'ai plié bagage pour reprendre illico et le plus rapidement possible ma place sur votre banquette arrière car c'est bien là que j'y vois le plus beau des paysages.

elle - Alors vous avez fait votre dernier voyage. Une forêt s'est jetée sur ma voiture entre Grenoble et Genève, il n'en reste plus rien sinon quand même une portière, blanche bien que plus très fraîche, et je vous l'ai gardé. Vous la trouverez sur le palier juste de l'autre côté de cette porte là-bas.


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B
Très beaux les mots façonnés dans cet atelier de confection de l'imaginaire
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